Les communautés à Dicranum viride (Sull. & Lesq.) Lindb. en France métropolitaine

Dicranum viride est une espèce rare en France, considérée comme taxon vulnérable en Europe et en nette régression sur l’ensemble de son aire de répartition européenne. Elle est mentionnée dans l’annexe II de la directive habitat comme espèce d’intérêt communautaire et dans le livre rouge des Bryophytes menacées d’Europe. Les connaissances sur son auto-écologie restent encore très sommaires et nécessitent des recherches plus précises pour mieux cerner les exigences environnementales de cette bryophyte corticole. Dans ce but, les auteurs font une synthèse des données récentes concernant Dicranum viride en France métropolitaine à la fois sur le plan de la distribution géographique actuelle, des conditions stationnelles générales, et de la position synsystématique de l’espèce.

Sur la base d’un nombre représentatif de relevés phytosociologiques effectués dans l’ensemble des régions françaises où l’espèce est encore observée, les auteurs présentent les premiers aspects de l’écologie de cette espèce sur le territoire national. Un certain nombre d’observations relatives au contexte sylvatique et au cortège dendrologique permettent de mieux cerner ses exigences stationnelles.

Ainsi Dicranum viride occupe une niche écologique particulière sur les arbres hôtes. Un rapport existe entre le diamètre des troncs et la hauteur atteinte par l’espèce. Dans la majorité des cas observés, les populations qui occupent seulement une partie de la circonférence semblent préférer les expositions allant du nord à l’est. L’analyse fine de la localisation des diverses groupes bryophytiques en contact avec Dicranum viride conduit les auteurs à proposer un modèle de stratégie de développement de l’espèce face aux pressions des diverses communautés bryophytiques corticoles et humo-corticoles. En particulier à la base des troncs, la colonisation puis la forte dynamique des groupements humo-corticoles climatiques à Isothecium sp. contraignent Dicranum viride à migrer plus haut sur les arbres.

La mise au point de la contribution synsystématique brute et pondérée (CSB et CSP) permet de mieux situer la place et l’importance de cette espèce au sein des unités phytosociologiques observées et de préciser l’importance des liens avec celles-ci.

Si sur le plan chorologique les communautés bryophytiques associées ne présentent pas d’originalité particulière, la présence de Dicranum viride peut être considérée comme l’expression d’une tendance médio-européenne dans un contexte bryologique circumboréal à légère tonalité montagnarde.

Les auteurs soulignent la nécessité d’approfondir les recherches sur les modes de traitement des peuplements forestiers et l’impact qu’ils peuvent induire sur la dynamique des populations de Dicranum viride. Ils suggèrent un suivi diachronique des populations les plus importantes dans des contextes régionaux différents en utilisant une guilde de paramètres écologiques et sylvicoles (structures des peuplements, architecture des arbres…). Enfin il apparaît qu’une meilleure connaissance de l’histoire des activités sylvicoles (pratiques sylvicoles, mode de traitement…) au niveau des stations à Dicranum viride, y compris les stations où l’espèce n’a pas été revue, serait une source d’information très utile pour la conservation voire la restauration de son habitat.