Mon objectif est d’explorer les questions critiques et méthodologiques liées à la reconstruction éventuelle des Anatomai, en partant de l’hypothèse qu’une telle reconstruction devrait se fonder sur un examen des textes et des contextes dans lesquels Aristote fait référence aux Anatomai et au rôle qu’il leur attribue dans l’enquête sur les différences et les causes en biologie. Je discute de manière critique les références faites par Aristote aux expériences de dissection, en les comparant aux références qu’il fait aux représentations anatomiques dans le but de montrer qu’aux yeux d’Aristote la valeur scientifique des preuves imagées n’est pas inférieure à l’expérience directe de la dissection, et qu’elle peut même avoir une priorité épistémologique. Les allusions d’Aristote à des expériences de dissection proprement dites évoquent souvent des procédures extrêmement simples. Cette simplicité semble incompatible avec la complexité des techniques anatomiques requises pour obtenir la quantité et la précision de détails qu’Aristote semble tirer des dessins anatomiques des Anatomai. D’autre part, Aristote a tendance à se concentrer, dans ses expériences anatomiques, sur un petit nombre de parties distinctives des animaux. Il semble donc peu probable que les Anatomai aient pu présenter un compte rendu encyclopédique de l’anatomie comparée. Pour rendre compte de ce clivage entre l’expérimentation anatomique et la représentation morphologique, je tente de décrire l’approche d’Aristote en établissant une distinction entre une anatomie du « quoi » et une anatomie du « pourquoi ».
Biologie d’Aristote, histoire de l’anatomie comparée, plan du corps, dissection, vivisection.