En étudiant la phase pélagique périodique de certains Crustacés normalement benthiques et ses rapports avec la crise génitale, j'ai été amené à me demander si la mue, qui est également un phénomène périodique, ne venait pas troubler de quelque manière la régularité de l'ascension de ces organismes dans le plancton, ajoutant une difficulté nouvelle à la recherche du déterminisme de leurs migrations verticales. J'avais observé, en effet, que, pour les Cumacés, la grande majorité des femelles rencontrées dans le plancton montraient une carapace translucide et molle, indiquant une mue toute récente. Je me rappelais qu'au moment de muer le Carcinus moenas se cache à l'abri de la lumière, sous les rochers ; que l'Ecrevisse s'isole de ses congénères, ne mange plus, reste immobile ; que le Nephrops, les Aristeomorpha, les Aristeus désertent les fonds de pêche et se retirent dans les endroits inaccessibles aux engins habituels. Au surplus, quand on songe qu'un Homard changeant de carapace abandonne près de 60 p. 100 de son poids et qu'il reconstitue cette masse rapidement, on ne peut douter qu'il s'agisse d'un travail considérable, nécessitant une dépense énorme d'énergie, susceptible d'entraîner un bouleversement total et périodique du métabolisme et du comportement. C'est pourquoi il m'est apparu que le phénomène de la mue domine, par ses incidences, toute la biologie des Crustacés et qu'il importe de s'appliquer à en avoir une exacte compréhension.