Situé à quelques kilomètres d’Angles-sur-l’Anglin (Vienne, France), le Roc-aux-Sorciers a livré, dans les années 1927 et 1950, une industrie du Magdalénien moyen et supérieur. Les analyses des sédiments du remplissage attribués, par ailleurs, au stade isotopique 2, mettent en évidence deux séquences climatiques dans les six ensembles définis au cours des fouilles. Une première séquence, correspondant aux niveaux d’occupations du Magdalénien moyen et au début de l’occupation du Magdalénien supérieur (base du remplissage de l’abri) montre que le climat est globalement froid, et particulièrement humide, ce qui ne corrobore pas l’hypothèse de l’oscillation d’Angles-sur-l’Anglin (climat doux et humide) émise par Bastin en 1975. En fait, le climat évolue progressivement vers un léger réchauffement de la base au sommet de la stratigraphie. Au cours de la seconde séquence correspondant à la période d’occupation du Magdalénien supérieur, le climat, relativement constant, est un peu plus chaud et assez humide. Les données stratigraphiques et sédimentologiques apportent donc des informations nouvelles sur les conditions de dépôts du remplissage et sur la paléoclimatologie de la région du Poitou-Charentes au cours de l’occupation magdalénienne.
Situated a few kilometres from Angles-sur-Anglin (Vienne, France), the Roc-aux-Sorciers cave has yielded in 1927 and 1950 industry of the Middle and Upper Magdalenian periods. Our analyses of the sedimentary filling, dated from isotope stage 2, demonstrate the existence of two climatic sequences in the six ensembles defined during the excavations. A first sequence, at the base of the cave filling, corresponds to the occupation levels of the Middle Magdalenian and of the early Upper Magdalenian. At that time, the climate was globally cold and particularly humid, a conclusion that does not support Bastin's 1975 hypothesis on the oscillation of Angles-sur-Anglin, which postulates a mild and humid climate. In fact, the climate evolved progressively towards a slight warming from the base to the top of the stratigraphy. During the second sequence, corresponding to the occupation period of the Upper Magdalenian, the relatively stable climate was slightly warmer and quite humid. Stratigraphical and sedimentological data thus provide new information on the conditions under which the filling was deposited and on the palaeoclimatology of the Poitou-Charentes region during Magdalenian occupation.
The Roc-aux-Sorciers, in the vicinity of Angles-sur-Anglin (
The presence of Magdalenian industry was noted as early as 1927 by
The 310 cm-thick section (
A zone of collapse of the rock face contains many blocks larger than 20 cm, a high percentage of stones of 9 to 10 cm, associated with a small percentage of sandy silts.
The orange ensemble (Upper Magdalenian) consists of small elements of limestone in a silty sediment. The granulometric curves of the fine fractions and the morphoscopy of the quartz are those of a loessic silt.
In the sediments, dated Upper Magdalenian, by their industrial artifacts, we find an abundance of limy elements of 1 to 2 cm embedded in a sandy and silty sediment. The top of Em (
The granulometric analyses of particles under 2 mm were performed on the unprocessed sediment with a Coulter LS-230 granulometer in the sedimentology laboratory of Tautavel. Mineralogical analyses of clay fractions were performed on three preparations for each sample (natural, glycoled, heated tests) by using the Holtzapffel protocol (
In a study of the rock face, BRGM (
Two sedimentary sequences are observed, leading to the definition of two climatic sequences.
Results on the Ej ensemble (Middle Magdalenian) show a high concentration of rounded quartz, frequent signs of dissolution, a high percentage of coarse sands, a significant percentage of kaolinite and smectite, and three important peaks of 9 to 10 cm-size stones (
The succession of colours over a small thickness of sediment, the peak of coarse sands and the three peaks of 9 to 10 cm-size stones are indicative of a cold climate (
The area of collapse, showing blocks larger than 10 cm and numerous stones of 9 to 10 cm, may be a result of microseisms rather than of extreme cold.
The orange ensemble (beginning of the Upper Magdalenian) is characterised by a predominance of small stones, a decrease of the percentage of coarse sands, less rounded quartz (
In ensembles Em, Eg, Eb (Upper Magdalenian), the quite stable percentage of 1 to 2 cm-size stones is dominant and the proportion of δ13C has changed from −3.5 to −7‰, suggesting a milder climate (
Other sites in the area display an industry attributed to the Magdalenian. While Magdalenian art is very well-known, the sedimentary sequences, where they exist, remain little or not at all studied. In the La Madeleine cave, an eponymous Magdalenian site,
Sedimentological analyses carried out at Roc-aux-Sorciers have demonstrated the existence of two sedimentary ensembles, corresponding to two climatic sequences: a cold and humid climate at the base of the filling (Ej, Middle Magdalenian). This conclusion does not support Bastin's hypothesis on the Angles-sur-Anglin oscillation (a temperate and humid climate); above (Upper Magdalenian), a climate milder than in the Middle Magdalenian, first comparatively dry, then progressively more humid; this climate trend appears to be confirmed by results from other disciplines (fauna and microfauna: under study); it will be interesting to compare these results with new sets of analyses on the other Magdalenian sites of the area, in order to understand better the environment of the humans who invented cave paintings.
Situé sur la commune d’Angles-sur-l’Anglin (Vienne), au pied de falaises calcaires oolithiques du Jurassique qui dominent la rive droite de l’Anglin (
Par la palynologie, Bastin (
Une récente campagne de prélèvements, destinée à une étude pluridisciplinaire, permet, à partir de l’application des techniques modernes dont celles de sédimentologie, de préciser les origines et les conditions paléoclimatiques de mise en place de l’ensemble des dépôts et de nuancer les interprétations de Bastin. Par ailleurs, des datations ont été effectuées dans plusieurs laboratoires (
Les noms attribués aux différentes couches sédimentologiques identifiées sur la coupe ont pu être corrélés aux niveaux archéologiques définis par Saint-Mathurin et Garrod lors de leurs fouilles. Notre étude a été réalisée sur la coupe de 3,10 m d’épaisseur, mise au jour dans l’abri Bourdois à 4,5 m en face de la paroi sculptée. Deux niveaux d’occupations, Magdalénien moyen et supérieur, y ont été mis en évidence. Six ensembles sédimentaires, dont un niveau comporte des éléments essentiellement dus à un effondrement de la paroi, ont pu être isolés (
Cet ensemble, de couleur jaune clair, de 50 cm d’épaisseur, a pu être subdivisé en quatre sous-ensembles. Il constitue le niveau le plus ancien de la stratigraphie et se caractérise par un sédiment caillouteux emballé dans une matrice sablo-limoneuse. Le sous-ensemble de la base (Ej base), possédant une forte proportion de pierres de diamètre de 9 à 10 cm, est également caractérisé par un fort pourcentage de sables fins et de limons et sa couleur jaunâtre serait, selon
D’une épaisseur de 20 cm en moyenne, cet ensemble provient très probablement d’un effondrement de la paroi. En effet, il contient de nombreux blocs calcaires non orientés de taille importante (> 10 cm) et un fort pourcentage de pierres de 9 à 10 cm de diamètre. Les pierres, non arrondies et corrodées de composition pétrographique voisine de celle de la paroi, sont associées à un faible pourcentage de limons sableux.
De petits éléments calcaires non arrondis et corrodés, dans un sédiment possédant un pourcentage élevé de granules et de limons, caractérisent cet ensemble de couleur claire, de 40 cm d’épaisseur.
Dans cet ensemble (60 cm d’épaisseur), de nombreux éléments calcaires de 1 à 2 cm emballés dans un sédiment sablo-limoneux marron forment 50 % des fractions grossières. Un pic relativement important de blocs calcaires de taille supérieure à 20 cm se situe au sommet. Les pierres possèdent des arêtes faiblement marquées.
Une proportion importante de blocs calcaires de taille supérieure à 20 cm se retrouve à la base de Eg. Les blocs, associés à un sédiment sablo-limoneux grisâtre, sont moins importants que précédemment. Les pierres arrondies et de petites tailles (1 à 2 cm) dominent.
Des blocs de 20 à 30 cm de diamètre et des fractions fines sablo-limoneuses sont observés en grande quantité dans cet ensemble de 70 cm d’épaisseur. Les pierres, de formes très variées, et les blocs sont de nature pétrographique homogène. À la base de Eb, nous observons des plaquettes de 2 à 5 cm de diamètre présentant des arêtes franches caractéristiques de périodes froides, que nous ne retrouvons pas dans la partie supérieure de cet ensemble où les pierres de tailles inférieures à 6 cm sont relativement abondantes.
Les prélèvements sédimentologiques ont été effectués en continuité sur l’ensemble de la coupe (
Les analyses granulométriques des fractions fines (
L’analyse minéralogique des fractions argileuses, réalisée en appliquant le protocole de Holtzapffel (
L’étude calcimétrique, réalisée sur la fraction inférieure à 2 mm du sédiment brut, a été effectuée par le calcimètre de Bernard au laboratoire de sédimentologie de Lille-1.
La morphoscopie et l’exoscopie des grains de quartz ont été réalisées à Tautavel, en utilisant le Microscope Électronique Environnemental à Balayage, Philips XL30 ESEM, et la microsonde à énergie dispersive EDAX.
L’étude des minéraux lourds a été réalisée à l’Institut de Paléontologie Humaine de Paris en utilisant le protocole mis au point par
Les analyses des isotopes stables du carbone (δ13C) ont été effectuées au laboratoire de biominéralisations et de paléoenvironnements de l’UPMC en utilisant un spectromètre de masse DualInlet (à double introductions et triple collecteurs).
Afin de mieux comprendre les origines et les conditions de mise en place des sédiments du remplissage de l’abri Bourdois du site du Roc-aux-Sorciers, une campagne de prospections et de prélèvements a été effectuée dans les différentes formations géologiques environnantes. Les analyses des sédiments marron foncé du plateau au-dessus du site montrent qu’ils sont mal triés et constitués d’un faible pourcentage de cailloux de petites tailles (50 mm) et de très peu de pierres de 8 cm de diamètre. Cet ensemble caillouteux est emballé dans une matrice sablo-limoneuse. Le pourcentage de CaCO3 est particulièrement faible (5 % environ). Concernant les fractions argileuses, les pourcentages de smectite (45 %) et de kiaolinite (32 % environ) sont proches de ceux existants dans le site. L’illite est présente en faible pourcentage (20 % en moyenne) et le taux de chlorite est faible (10 % environ). Ces résultats montrent que les sédiments du Roc-aux-Sorciers peuvent, en partie, provenir du plateau. Cependant, la palygorskite, présente dans le remplissage, ne se retrouve pas dans les sédiments de l’environnement. D’autre part, les interstratifiés chlorite-vermiculite apparaissent en grande quantité sur le plateau (environ 55 %), alors qu’aucun interstratifié n’est identifié dans les sédiments de l’abri. Ces résultats confirment bien que les sédiments du plateau situé juste au-dessus du remplissage ne sont pas l’apport principal des sédiments de l’abri.
Les sédiments du plateau situé en face du gisement, sur la rive gauche de l’Anglin, sont composés de pierres de 1 à 2 cm de diamètre emballées dans une matrice sablo-limoneuse. Le pourcentage de carbonate est de 20 % en moyenne et reste donc assez éloigné du taux de CaCO3 de l’abri (en moyenne 50 %). Ces sédiments ne semblent donc pas être une source d’apport des sédiments présents dans le remplissage de l’abri.
Nous avons pu établir une carte de répartition du cortège de minéraux argileux situant les différentes zones où se retrouvent les argiles présentes dans la coupe stratigraphique avec des proportions relativement proches (
Pour les sédiments du Magdalénien moyen (Ej), un apport important d’argiles provient des zones à kaolinite, située au nord du site du Roc-aux-Sorciers.
En ce qui concerne les ensembles Eo, Eg, Eb (industrie du Magdalénien supérieur), les zones contenant surtout de la smectite, au sud du site, sont les endroits principaux d’approvisionnement de celle-ci. Cependant, les zones constituées de kaolinite continuent d’approvisionner le site, mais en plus faible quantité.
L’étude des minéraux lourds, réalisée sur la fraction III (de 0,160 à 0,040 mm), montre un cortège minéralogique homogène sur l’ensemble du remplissage de l’abri, constitué d’hornblende verte et de tourmaline dominantes (25 % environ), de sphène, d’épidote et de grenat (entre 7 et 8 %), de zircon et de staurotide avec un pourcentage compris entre 6 et 5 %, de disthène, de rutile et de sillimanite (environ 3 %) et enfin de zoïsite et d’hypersthène (environ 2 %). Cette composition est identique à celle des sédiments du plateau, ce qui laisse supposer un transport sur une faible distance.
Des origines plus lointaines peuvent être envisagées pour ces minéraux lourds retrouvés dans le remplissage de l’abri (
Ainsi, les analyses effectuées dans l’environnement montrent que la plus grande partie des sédiments du remplissage a été transportée dans les fissures de la roche encaissante et l’autre partie, plus lointaine, a été apportée par la rivière et le vent.
Nous avons vu que l’étude de l’ensemble des pierres (granulométrie, morphométrie, corrosion) et blocs présents dans l’abri Bourdois montre qu’ils proviennent essentiellement du calcaire de la paroi. En effet, des études de la paroi, réalisées par le BRGM en 1994 (
Les analyses sédimentologiques des fractions fines (granulométrie, minéralogie des sables et des fractions argileuses, morphoscopie et exoscopie des quartz et géochimie) mettent en évidence deux grandes séquences dans le remplissage du site ( à la base, une première séquence comprise entre 310 et 200 cm correspondant à une occupation du Magdalénien moyen (datations : couche C : 14 770 ± 140, Gif A94190 et couche E : 14 510 ± 160, Gif194191 ( la seconde séquence sédimentaire (Magdalénien supérieur), située au-dessus de la précédente (datations : couche B4 : 13 720 ± 140 , GifA94192 et 10 800 ± 120 GrN 2912 (
L’ensemble Ej contenant une industrie attribuée au Magdalénien moyen est caractérisé par l’abondance de cailloux de petites tailles. Cependant, à trois reprises (au niveau de S1, S3 et S6), les pierres de 9 à 10 cm de diamètre atteignent 20 % à 30 %, laissant suggérer que l’intensité de l’eau circulant dans les fissures et fractures de la paroi a été plus forte durant ces trois périodes (
La succession de niveaux de couleurs distinctes (jaune, ocre, noire) de faible épaisseur (moins de 10 cm), le pic de sables grossiers (60 % en moyenne) au niveau de S3 et l’alternance des trois pics de pierres de 9 à 10 cm avec des couches sans pierres de grandes tailles mettent en évidence un climat relativement humide avec des périodes courtes de refroidissement.
Ainsi, l’hypothèse de Bastin, d’un climat doux et très humide ne semble pas se corréler avec nos résultats sédimentologiques. Un climat humide et froid serait plus probable pour caractériser le paléoclimat de ce Magdalénien moyen (
La zone d’effondrement, marquée par de nombreux blocs calcaires compacts, sans arêtes franches, de diamètre supérieur à 20 cm et par 20 % à 25 % de pierres de 9 à 10 cm, ne peut être le résultat d’un froid très rigoureux mais laisse suggérer l’action de microséismes provoqués par les failles alentour qui accentuent la fragilité naturelle de la paroi.
L’ensemble orange contenant une industrie du début du Magdalénien supérieur se caractérise par une dominance des pierres de petites tailles (< 5 cm), une disparition des pierres de 9 à 10 cm de diamètre, des grains de quartz moins émoussés que dans Ej et la diminution importante de la proportion des sables grossiers (30 % en moyenne). Le pourcentage des limons a légèrement augmenté et présente des variations de 10 % environ (
Dans la deuxième séquence sédimentaire (ensemble marron, gris et blanc correspondant à une industrie attribuée au Magdalénien supérieur), nous avons vu précédemment que le taux de carbonates augmentait régulièrement de la base (40 %) vers le sommet (70 %). Le pourcentage de pierres (
Par l’étude de la géochimie des isotopes du carbone (δ13C), il a été également possible de déterminer la variation du δ13C sur l’ensemble de la coupe stratigraphique (
Le Magdalénien de l’abri Bourdois du Roc-aux-Sorciers se révélant d’une importance particulière, il a paru intéressant de comparer différents niveaux magdaléniens actuellement connus, à cette séquence que nous considérons comme pouvant servir de séquence type.
En effet, d’autres sites de la région contiennent une industrie attribuée au Magdalénien et l’art associé à ces gisements archéologiques est très bien étudié. Cependant leurs séquences sédimentaires, souvent rares voire inexistantes, ne permettent pas de proposer une évolution climatique, contrairement à ce que nous avons pu observer dans l’abri Bourdois du Roc-aux-Sorciers qui reste donc un site de références dans l’Europe occidentale.
Dans la grotte de La Madeleine (Périgord), site éponyme du Magdalénien, les dernières fouilles réalisées par
La grotte de Montgaudier (Montbron, Charente) possède (
La Chaire-à-Calvin (Mouthiers-sur-Boëme, Charente), dont le remplissage se compose de couches du Magdalénien supérieur, possède une zone d’effondrement qui rappelle celle du Roc-aux-Sorciers (
La description de la stratigraphie de la grotte de La Marche (Lussac-les-Châteaux, Vienne) (
Enfin, la grotte du Bois-Ragot (Gouex, Vienne), dont la stratigraphie a été bien étudiée, possède deux niveaux préhistoriques datés du Magdalénien supérieur et deux niveaux aziliens (
Du fait de la rareté des dépôts mis au jour, les séquences du Poitou-Charentes, contenant des industries magdaléniennes, restent encore peu connues sur le plan des paléoenvironnements. Par l’importance exceptionnelle de son remplissage et par la découverte de la frise sculptée qui y est associée, l’abri du Roc-aux-Sorciers est devenu un site privilégié et de référence pour la connaissance de cette période culturelle, apogée de l’art préhistorique et pour celle des paléoclimats qui lui ont été contemporains.
Le protocole des techniques modernes physico-chimiques, spécialement mis en œuvre pour ce site, a permis de mettre en évidence d’une manière très nette, deux ensembles sédimentaires qui peuvent être attribués à deux grandes séquences climatiques, résultats également confortés par ceux obtenus dans d’autres disciplines (faune et microfaune en cours d’étude).
À la base du remplissage (Magdalénien moyen), la granulométrie, la géochimie, l’exoscopie, la morphoscopie et l’étude des isotopes (δ13C) mettent en évidence un climat relativement froid et fortement humide. Or, par son étude palynologique, Bastin arrivait à la conclusion d’un contraste entre Magdalénien moyen et supérieur (
L’étude des sédiments contenant une industrie attribuée au Magdalénien supérieur montre un climat plus clément qu’au Magdalénien moyen, avec des températures légèrement plus chaudes. Cette période semble, au début, se caractériser par un climat plus sec qu’au Magdalénien moyen, puis relativement humide pour le reste du Magdalénien supérieur. Au sommet du remplissage, le climat devient modérément humide s’expliquant par une évolution plus récente des sédiments proche de la surface. Cette nouvelle approche, réalisée à partir de l’analyse des sédiments, par des méthodes physico-chimiques modernes, permet donc de préciser pour cette période, les divers aspects du refroidissement mis en évidence par les résultats obtenus dans d’autres disciplines (faune et microfaune en cours d’étude) et surtout de mieux apprécier l’existence et l’intensité de phases humides et sèches au cours du Tardiglaciaire (
Nous tenons à remercier le Service Régional de l’Archéologie de Poitou-Charentes pour nous avoir confié cette étude. Tous nos remerciements également aux laboratoires qui nous ont accueillis et nous ont facilité la réalisation des analyses sédimentologiques, plus particulièrement : le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France ; le Centre Européen de Recherche Préhistorique de Tautavel ; le Bureau de Recherche Géologique et Minière de Poitou-Charentes ; le laboratoire de sédimentologie de l’Université de Lille-1 et l’Institut de Paléontologie Humaine de Paris ; le laboratoire de Biominéralisation et de Paléoenvironnement de l’UPMC et le Centre de Recherches Pétrographiques et Géochimiques de Nancy.
Localisation géographique du Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). Le site du Roc-aux-Sorciers, exposé plein sud, est situé au pied d’une falaise calcaire du Jurassique (calcaire blanc de l’Oxfordien moyen et supérieur) et au bord de la rivière de l’Anglin. Les alentours de la vallée de l’Anglin sont constitués de trois grands types de calcaires du Jurassique (calcaires blancs de l’Oxfordien moyen et supérieur, calcaires marneux coralliens et récifaux de l’Oxfordien supérieur, calcaires à mollusques de l’Oxfordien supérieur) et de sédiments du Crétacé.
Geographic localisation of « Roc-aux-Sorciers » (Angles sur l’Anglin, Vienne). The Roc-aux-Sorciers cave, exposed to the south, is located at the bottom of a cliff of Jurassic limestone (white limestone of the Middle and Upper Oxfordian) on the bank of the Anglin river. The surrounding area is composed of three types of Jurassic limestones (white limestone of the Middle and Upper Oxfordian, marly and reef limestones of the Upper Oxfordian and mollusc-bearing limestone of the Upper Oxfordian), and of Cretaceous sediments.
Coupe stratigraphique d’est en ouest du Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). Les noms attribués aux différentes couches de sédiments utilisés dans la description stratigraphique sont corrélés aux couches archéologiques définies par Saint-Mathurin et Garrod lors de leurs fouilles. La coupe de 310 cm d’épaisseur montre trois niveaux d’occupations : Magdalénien moyen, début du Magdalénien supérieur et Magdalénien supérieur. Les prélèvements sédimentologiques ont été réalisés sur l’ensemble de la coupe en continuité.
East-west stratigraphic section of the Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). The names given to the various strata in the stratigraphical description have been correlated with the archeological beds defined by Saint-Mathurin and Garrod during their excavations. The 310 cm-thick section shows three levels of occupation: Middle Magdalenian, beginning of the Upper Magdalenian and Upper Magdalenian. Sediments were sampled in continuity over the whole section.
Sédimentologie du remplissage de l’abri du Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). Les données sédimentologiques : granulométrie, variations des pourcentages de carbonates et de la fraction argileuse mettent en évidence deux séquences sédimentaires montrant deux séquences climatiques : la première séquence, de 310 à 200 cm de profondeur, dont l’industrie est attribuée au Magdalénien moyen et à la base du Magdalénien supérieur, montre un climat humide et relativement froid ; la seconde séquence, de 200 à 50 cm de profondeur, (Magdalénien supérieur) suggère un climat un peu plus chaud et relativement humide.
Sedimentology of the filling of the Roc-aux-Sorciers cave (Angles sur l’Anglin, Vienne). The sedimentological data (granulometry, percentage variations of carbonates and of the clay fraction) show two sedimentary sequences highlighting two climatic sequences: the first sequence (depth between 310 and 200 cm), with an industry dated Middle Magdalenian and base of the Upper Magdalenian, indicates a humid and relatively cold climate; the second sequence (200 to 50 cm depth, Upper Magdalenian) suggests a slightly warmer and relatively humid climate.
Abri du Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). Exoscopie des grains de quartz observés dans les différents niveaux d’occupation magdalénienne. a (Magdalénien moyen). Le quartz montre une surface polie, recoupée de marques de chocs mécaniques. b (Magdalénien moyen). Le quartz, émoussé luisant laisse supposer un milieu relativement humide. c (Magdalénien supérieur). Le grain à surface lisse possédant des marques de choc et présentant des indices d’éolisation met en évidence un climat moins humide. d (Magdalénien supérieur). On observe des marques de dissolution d’origine pédologique supposant une humidité relativement importante. e et f (détail du grain précédent, Magdalénien supérieur). On peut voir un grain lisse, peu usé et constitué d’une zone à fleurs de silice traduisant une altération pédologique en relation avec une immobilisation du grain.
Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). Exoscopy of quartz grains observed in the various Magdalenian occupation levels. a (Middle Magdalenian). Quartz shows a polished surface with marks of impact. b (Middle Magdalenian). Rounded shiny quartz suggests a comparatively humid climate. c (Upper Magdalenian). Polished grain showing impact marks and signs of eolisation indicate a less humid climate. d (Upper Magdalenian). We observe pedologic dissolution marks, suggesting quite important humidity. e and f (detail of previous grain, Upper Magdalenian). The grain is smooth, with silica flowers, and shows pedologic weathering during its immobilisation.
Proposition de synthèse climatique à partir des données sédimentologiques du Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). Le climat est relativement froid et fortement humide durant la période où l’industrie est attribuée au Magdalénien moyen. L’humidité diminue et le climat devient un peu plus chaud. Puis le taux d’humidité augmente progressivement pendant la période où l’industrie correspond au Magdalénien supérieur et le climat devient relativement tempéré.
Proposed climatic synthesis from sedimentological data at Roc-aux-Sorciers (Angles sur l’Anglin, Vienne). The climate is relatively cold and very humid during the period ascribed to Middle Magdalenian industry. Humidity decreases afterwards and climate becomes warmer in the Upper Magdalenian. Humidity increases progressively during the period of industry ascribed to the Upper Magdalenian and climate becomes relatively temperate.
Courbe de géochimie isotopique permettant de mettre en évidence l’évolution des températures relatives. A la base de la stratigraphie (Magdalénien moyen), le climat est plus froid que durant la période attribué au Magdalénien supérieur, où les températures semblent relativement constantes.
Isotope geochemistry curve illustrating the evolution of relative temperatures. At the base of the stratigraphical record (Middle Magdalenian), the climate is colder than during the period ascribed to the Upper Magdalenian, which shows relatively stable temperatures.
Essai de corrélation avec les données paléoclimatiques globales. L’augmentation légère de la température tout au long de la stratigraphie semble se confirmer avec la courbe des variations de δ18O de la période du Dryas I (
Tentative correlation with global paleoclimatic data. The slight increase of temperature all along the stratigraphical record appears to be confirmed by the curve of δ18O variations of the Dryas I (