PALEVO1631-0683ElsevierS1631-0683(04)00090-910.1016/j.crpv.2004.04.004Research articlePaléontologie humaine et préhistoire« Toumaï », Miocène supérieur du Tchad, le nouveau doyen du rameau humainY. Coppens, M. BrunetBrunetMichelmichel.brunet@univ-poitiers.fraGuyFranckabBoisserieJean-RenaudacDjimdoumalbayeAhountaadLehmannThomasaLihoreauFabriceaLouchartAntoineeSchusterMathieufTafforeauPaulhLikiusAndossagMackayeHassane TaissogBlondelCécileaBocherensHervéhDe BonisLouisaCoppensYvesiDenisChristianejDuringerPhilippefEisenmannVérajFlischAlexanderkGeraadsDenislLopez-MartinezNievesmOteroOlgaaCampomanesPablo PelaeznPilbeamDavidbde LeónMarcia PonceoVignaudPatrickaViriotLaurentaZollikoferChristophoTous les co-auteurs sont membres de la Mission paléoanthropologique franco-tchadienne (MPFT)
Laboratoire « Géobiologie, Biochronologie et Paléontologie humaine », UMR CNRS 6046, faculté des sciences, université de Poitiers, 40, av. du Recteur-Pineau, 86022 Poitiers cedex, France
Peabody Museum, Harvard University, États-Unis
University of California, Berkeley, États-Unis
CNAR N'; Djaména, Tchad
CNRS UMR 5125, université Claude-Bernard, Villeurbanne, France
CNRS UMR 7517, université Louis-Pasteur, Strasbourg, France
Université de N'Djaména, Tchad
CNRS UMR 5554, université Montpellier-2, France
Collège de France, Paris, France
Muséum national d'histoire naturelle & CNRS UMR 8569, Paris, France
Swiss Institute for Materials Testing, Dübendorf, Suisse
CNRS, UPR 2147, Paris, France
Universidad Complutense, Madrid, Espagne
Museo de Ciencias Naturales, Madrid, Espagne
Anthropologisches Institut/Multimedia Laboratorium, Universität Zürich–Irchel, Suisse
La Mission paléoanthropologique franco-tchadienne (directeur : Michel Brunet), collaboration scientifique entre l'université de Poitiers, l'université de N'Djaména et le Centre national d'appui à la recherche (CNAR, N'Djaména), regroupe une quarantaine de chercheurs appartenant à une dizaine de nationalités et conduit un programme international de recherches pluridisciplinaires portant sur « l'origine et les environnements des premiers hominidés ».
La Mission paléoanthropologique franco-tchadienne (MPFT) est une collaboration scientifique entre l'université de Poitiers, l'université de N'Djaména et le centre national d'appui à la recherche (CNAR) de N'Djaména. Cette mission conduit un programme international de recherches sur l'origine et les environnements des premiers Hominidés et vient de décrire, au Nord Tchad, le plus ancien hominidé connu. L'extraordinaire matériel fossile (un crâne sub-complet, deux fragments de mâchoire inférieure et trois dents isolées) mis au jour par la MPFT appartient à un nouvel hominidé : Sahelanthropus tchadensis Brunet et al. 2002. Découvert dans le Miocène supérieur de Toros-Menalla (désert du Djourab, Nord Tchad), le nouvel hominidé est associé à une faune indiquant un âge biochronologique proche de 7 Ma (basé sur le degré évolutif de différentes espèces de mammifères, notamment proboscidiens, anthracothériidés et suidés). Cette faune est composée d'espèces de vertébrés aquatiques et amphibies, ainsi que d'espèces liées à la forêt galerie et en îlots, la savane arborée et la prairie à graminées. Les études sédimentologiques sont en accord avec le caractère périlacustre de cette mosaïque de paysages située entre lac et désert. Le nouvel hominidé possède un ensemble original de caractères primitifs et dérivés qui permet de le considérer, non seulement comme proche du dernier ancêtre commun aux chimpanzés et aux humains, mais aussi comme le plus ancien représentant des hominidés. Sa position géographique, 2500 km à l'ouest de la Vallée du Rift, et son âge très ancien suggèrent une vaste répartition géographique (Sahel et Afrique Orientale) des hominidés anciens au moins dès 6 Ma et une divergence chimpanzé-humain plus ancienne (avant 7 Ma) que ne le proposaient la plupart des phylogénies moléculaires.
‘Toumaï’, Late Miocene of Chad, the new earliest member of the human branch. The new Chadian hominid Sahelanthropus tchadensis Brunet et al., 2002, nicknamed ‘Toumaï’, recovered by the MPFT (Mission paléoanthropologique franco-tchadienne, scientific collaboration between the University of Poitiers, University of N’Djamena and CNAR, National Center for the support of Science of N’Djamena) from the Late Miocene of Toros-Menalla (Djurab desert) is associated with a vertebrate fauna (more than 45 species) for which the mammalian component (at least 25 species) indicates a biochronological age close to 7 Ma. The fauna comprises vertebrates that are aquatic (fish, turtles, crocodiles) and amphibious (anthracotheriids, hippopotamids) but also species adapted to the gallery and islet forests (monkeys), wooded savanna (proboscideans, giraffids, suids, etc) and grassland (bovids, tridactyl equids). Sedimentological data (aeolian sandstones, perilacustrine sandstones, diatomites) agree with this mosaic of environments and indicate a vegetated perilacustrine belt between lake and desert. The new hominid is probably temporally close to the common ancestor of chimpanzees and humans but displays a unique combination of primitive and derived characters that clearly shows a close relationship with later hominids rather than with chimpanzees or gorilla. The geographic location of Toumaï, 2500 km west of the Rift Valley, along with its great antiquity, suggest an early widespread hominid distribution (Sahel and East Africa, at least by 6 Ma), and a somewhat earlier chimpanzee-human divergence (at least by 7 Ma ago) than previously indicated by many molecular studies.
Hominidé ancien, Miocène supérieur, Afrique Centrale, TchadEarly hominid, Upper Miocene, Central Africa, ChadmiscellaneousRédigé à l'invitation du Comité éditorialHistorique
Le premier préhumain, Australopithecus africanus Dart, 1925 [13] a été mis au jour en Afrique du Sud (Fig. 1).
Puis les découvertes se sont succédé à la fois en Afrique du Sud et en Afrique de l'Est, où de nouvelles espèces d'australopithèques ont été décrites entre 4,1 et 2,5 Ma dans des milieux de type savane arborée [18] and [22]. Les paranthropes [1], [3] and [21], formes plus grandes et plus robustes adaptées à des milieux plus ouverts, ont été découverts dans des niveaux plus récents (entre 2,6 et 1,3 Ma).
Cette distribution géographique singulière, associée au fait que les plus anciens préhumains étaient est-africains, a conduit certains auteurs à envisager l'hypothèse d'une origine des hominidés dans les savanes d'Afrique orientale (East Side Story) [12] and [19].
Depuis 1994, des formes encore plus anciennes ont été successivement découvertes en Éthiopie : Ardipithecus ramidus (4,4–5,8 Ma) [16] and [31], et au Kenya : Orrorin tugenensis (5,8 Ma) [29], mais toutes sont associées à des faunes d'environnements boisés.
Enfin, à l'ouest de la Vallée du Rift, des recherches ont été entreprises dans les années 80 par deux d'entre nous, d'abord au Cameroun (M.B. et D.P.), puis (par M.B.) au Nord Tchad (erg du Djourab) depuis janvier 1994, dans le cadre de la MPFT (Mission paléoanthropologique franco-tchadienne), un programme international de recherches pluridisciplinaires qui pour le moment a notamment publié deux découvertes majeures : Australopithecus bahrelghazali Brunet et al., 1996 [5] and [6] et Sahelanthropus tchadensis Brunet et al., 2002 [10], [11] and [30]. Ces deux découvertes conduisent à revoir de manière drastique nos conceptions sur les paleoscenarii des phases les plus précoces de l'histoire des hominidés.
Dans ce travail, nous considérons les hominidés (ensemble du rameau humain) comme le groupe frère des panidés (les chimpanzés) avec lesquels ils partagent un ancêtre commun exclusif.
La découverte de Toumaï
Les fossiles ont été découverts au Nord Tchad, dans la partie occidentale de l'erg du Djourab, plus précisément dans la région de Toros-Menalla. Le secteur fossilifère de Toros-Menalla est situé au nord du 16e parallèle, à une longitude comprise entre 17° et 19° est, c'est-à-dire à plus de 150 km à l'ouest des sites de Koro-Toro, qui ont livré Abel, le premier australopithèque mis au jour en 1995 par la MPFT. à l'ouest (plus de 2500 km) de la Vallée du Rift [5] and [6].
Le secteur fossilifère de Toros-Menalla a été découvert par la MPFT en 1997 (Fig. 1). Plus de 300 sites à vertébrés fossiles sont actuellement répertoriés et c'est l'un d'entre eux, TM 266, qui a livré les restes du nouvel hominidé. Les fossiles proviennent d'un niveau de grès périlacustre qui correspond à des sédiments déposés en bordure du paléolac Tchad. Cette région maintenant désertique est d'une platitude stratigraphiquement désolante (dépourvue de coupes géologiques), cette monotonie n'étant interrompue que par les dunes actuelles. En revanche, cet erg fait actuellement l'objet d'une intense déflation. L'érosion éolienne (de violentes et fréquentes tempêtes de sable érodent environ 3 cm de grès par an) a mis au jour ces niveaux fossilifères anciens.
Depuis 1994, les campagnes de prospection et de fouilles paléontologiques ont livré pour le moment plus de 10 000 restes de vertébrés fossiles inventoriés et déterminés [7], [8] and [9]. Le crâne sub-complet du nouvel hominidé a été trouvé par l'un des membres de la MPFT (A.D.) [10].
Tous les fossiles sont conservés à N'Djaména, au Centre de valorisation des collections du Cnar (Centre national d'appui à la recherche). En revanche, pour permettre la mise en œuvre de techniques d'étude et d'analyse liées à des équipements scientifiques particulièrement lourds (scanners médicaux et industriels, synchrotron, spectromètre de masse, sonde ionique, etc), certains fossiles sont empruntés pour une durée déterminée. Après étude, tous retournent à N'Djaména.
Faune
TM 266, le site où a été découvert Toumaï, a une superficie d'environ 1,5 km2, mais les restes d'hominidés actuellement publiés ont tous été récoltés sur une surface d'environ 5000 m2[30].
Six restes d'hominidés ont été décrits : 1 crâne sub-complet, 2 fragments de mâchoires inférieures et 3 dents isolées (une canine inférieure ; une incisive supérieure et le bourgeon d'une troisième molaire supérieure) qui représentent au moins trois individus appartenant à la nouvelle espèce Sahelanthropus tchadensis.
Ce nouvel hominidé est associé à TM 266 à plus de 1000 restes de vertébrés qui représentent plus de 45 espèces dont au moins 25 de mammifères : singes, rongeurs, lagomorphes, carnivores, proboscidiens, tubulidentés, équidés tridactyles, hippopotamidés, anthracothériidés, suidés (nyanzachoeres), giraffidés, bovidés, etc. [30].
Paléoenvironnement
Depuis au moins 7 Ma (Miocène supérieur), la région de Toros-Menalla (Nord Tchad) a connu une succession de phases humides (associées à un « méga-lac Tchad ») et de phases arides (associées au désert) [14], [27], [28] and [30]. Actuellement, cette région est désertique et le lac Tchad n'occupe plus, depuis ces dernières années, qu'une superficie d'environ 5000 km2, alors que le dernier méga-lac Tchad holocène (il y a environ 5000 ans) avait une superficie de plus de 400 000 km2[15]. Ceci se traduit pour le site TM 266, par une série sédimentaire comprenant des sables éoliens (désert), surmontés par un grès périlacustre (transgression fluvio-lacustre), lui-même coiffé par des argiles vertes et des diatomites (lac). Le nouvel hominidé et les vertébrés fossiles associés proviennent du niveau gréseux périlacustre [30].
Les contextes sédimentologique et faunique traduisent une mosaïque de paysages, entre lac et désert, à milieux dulçaquicoles fréquentés par des faunes aquatiques et amphibies (poissons, crocodiles, serpents, tortues, anthracothériidés, hippopotamidés), avec forêts galerie et en îlots (singes) et des espaces de savane arborée parsemée de prairies à graminées (rongeurs, lagomorphes, proboscidiens, équidés, bovidés, giraffidés).
La composition de la faune mammalienne marquée par l'abondance des bovidés (plus de la moitié des restes) et des mammifères amphibies (plus du quart) [2], témoigne de la diversité de ces paysages, plus ou moins ouverts, situés entre lac et désert, c'est-à-dire dans un contexte très inhabituel [30].
Au Botswana, dans le Kalahari central, le delta de l'Okavango, bien que beaucoup plus réduit en superficie (moins de 25 000 km2) et topographiquement plus élevé (en moyenne 1000 m d'altitude), nous semble pouvoir être considéré comme un bon analogue actuel, à la fois par la diversité de ses environnements (mosaïque de fleuve-lac, forêts galerie et en îlots, savane arborée, prairie herbeuse, désert) et la grande richesse de sa faune.
Les études en cours permettront de préciser, dans ces paléonvironnements du Miocène supérieur, la place occupée par ce nouvel hominidé ainsi que ses préférences écologiques dans cette mosaïque de paysages.
Datation biochronologique
Le contexte géologique, marqué dans cette région par l'absence de niveaux volcaniques à l'affleurement, n'a pas permis, pour l'instant, d'obtenir de datations absolues. Par contre, le degré évolutif des espèces de mammifères du site TM 266 peut être comparé à celui des espèces d'autres sites africains dont l'âge radiochronologique est connu. En particulier, le stade évolutif des suiformes (Nyanzachoerus syrticus, Libycosaurus petrochii) et des éléphants (Loxodonta aff. n. sp. Lukeino stage) [25], mis au jour sur le site TM 266, permet de proposer un âge biochronologique plus ancien que 6 Ma (site de Lukeino au Kenya) et comparable à celui du membre inférieur de la formation Nawata du site kenyan de Lothagam (6,4–7,5 Ma) [24], c'est-à-dire au voisinage de 7 Ma.
Le nouvel hominidé
Dans le désert du Djourab, le nom de « Toumaï » est donné aux jeunes enfants nés avant la saison sèche. Il nous a été proposé par les plus hautes autorités tchadiennes et signifie, en langue goran, « espoir de vie ».
En fonction des éléments connus de la tête osseuse (Fig. 2 and Fig. 3), on peut envisager un poids proche de 45 kg et une taille voisine de celle du chimpanzé commun (Pan troglodytes). Mais par ses caractères anatomiques crâniens, S. tchadensis est plus proche des hominidés fossiles plus récents que des chimpanzés et des gorilles [10] and [11].
L'absence de restes osseux des membres ne permet pas de dire si Toumaï était bipède. Toutefois, une telle aptitude serait en accord avec les caractères de la face et du basicrâne qu'il partage avec les hominidés bipèdes avérés et plus récents [10].
Le crâne (Fig. 2) est caractérisé par une face haute, peu prognathe dans sa partie sub-nasale, avec un très fort bourrelet sus-orbitaire (très probablement un caractère mâle) sans sulcus post-toral, associée à une capsule cérébrale allongée. La capacité cérébrale faible (environ 320–380 cm3) est comparable à celle des chimpanzés communs actuels. L'arcade dentaire est upsiloïde, avec des dents jugales moins élargies que celles des australopithèques, mais plus grandes que celles des chimpanzés. Les prémolaires inférieures (Fig. 3A2) ont trois canaux pulpaires, avec une racine mésiale et deux distales plus ou moins coalescentes. L'émail des dents est en moyenne plus épais que chez les chimpanzés, mais moins épais que chez les australopithèques.
Toumaï a des canines supérieures de petite taille, coniques à usure apicale, moins asymétriques que celles d'Ardipithecus (4,4–5,8 Ma) [16] and [31], mais qui semblent bien distinctes de celles d'Orrorin (5,8 Ma) décrites dans la littérature comme ressemblant à celles d'un chimpanzé femelle [29].
La canine supérieure de Toumaï n'a pas de crête distale et l'inférieure présente une usure distale (liée à l'occlusion avec la canine supérieure) située uniquement au-dessus du tubercule distal (Fig. 3B). Ces deux particularités anatomiques traduisent une tendance évolutive conduisant à la perte de la facette aiguisoir sur la troisième prémolaire inférieure. Cette absence est caractéristique d'un complexe C-P/3 non tranchant. Dans l'état actuel de nos connaissances, il s'agit là d'une apomorphie du clade des hominidés [10].
En définitive, S. tchadensis possède une association originale de caractères : canines petites à usure apicale, complexe C-P/3 non tranchant, absence de diastème, épaisseur intermédiaire de l'émail, prognathisme subnasal réduit, torus sus-orbitaire fort et continu, absence de sulcus post-toral, trou occipital en position plus antérieure que chez les grands singes africains et plan nuchal très incliné postérieurement, indiquant son appartenance au rameau humain [10] and [11].
Relations de parenté et implications phylogénétiques
S. tchadensis présente un ensemble original de caractères anatomiques de la face, de la denture et du basicrâne, qui le sépare nettement des grands singes africains actuels (gorilles et chimpanzés) et indique clairement son appartenance au rameau humain, au sein duquel il se distingue de tous les autres hominidés fossiles décrits jusqu'à ce jour (Homo, Paranthropus, Kenyanthropus, Australopithecus, Ardipithecus et Orrorin). Toumaï appartient bien à un nouveau taxon [10] and [11]. Par ses canines coniques, il est moins dérivé que Ardipithecus (4,4–5,8 Ma). Compte tenu du caractère très fragmentaire du matériel actuellement publié pour Orrorin (5,8 Ma), les comparaisons sont difficiles. Toutefois par sa canine supérieure très semblable à celle d'un chimpanzé femelle [29], Orrorin semble s'éloigner du nouvel hominidé tchadien.
Son âge, voisin de 7 Ma, et l'ensemble de ses caractères anatomiques indiquent qu'il est proche du dernier ancêtre commun aux chimpanzés et aux humains (Fig. 4). Il montre que cette dernière dichotomie est sûrement plus ancienne (au moins 7 Ma) que généralement prévu par la plupart des phylogénies moléculaires [20] and [26].
Pour le moment, tous ces éléments font de S. tchadensis le plus ancien hominidé connu ; il doit être considéré comme le groupe frère de toutes les formes ultérieures (Fig. 4). Il nous donne sûrement une bonne image du candidat ancêtre du rameau humain.
Les analyses en cours (anatomie, phylogénie, reconstitution 3D, biogéochimie isotopique, méso- et micro-usures dentaires, microstructure, paléohistologie, analyses sédimentologiques et fauniques, biogéographie, biochronologie, etc) permettront de mieux connaître ce nouvel hominidé, ses préférences écologiques et son environnement.
Par ailleurs, d'un point de vue biogéographique, les résultats déjà publiés par la MPFT. ont mis en évidence que l'Afrique centrale (Tchad) est, au moins entre 3 et 7 Ma, une région carrefour marquée par des échanges fauniques intermittents avec l'Afrique septentrionale et l'Afrique orientale [2], [7], [8], [9], [23], [25] and [30]. Les études en cours s'attachent également à mieux cerner les mécanismes et la dynamique migratoire de ces faunes. Ceci est nécessaire à la compréhension de l'origine et de la dispersion des premiers représentants du rameau humain et donc de l'histoire des hominidés. Pour cela, des collaborations sont déjà engagées avec les grandes équipes qui travaillent en Afrique orientale (Éthiopie, Kenya), notamment entre autres, pour les proboscidiens [25], hippopotamidés [2], suidés [4], tubulidentés et rongeurs.
En conclusion, trois fenêtres ont été successivement ouvertes en Afrique sur les phases les plus anciennes de notre histoire : la première en 1925 par Raymond Dart en Afrique du Sud [13], la seconde en Afrique orientale par Louis et Mary Leakey en 1959 [21] et, enfin, la troisième en Afrique centrale (Tchad) par la MPFT. depuis 1995 [5]. Avec S. tchadensis, nous avons accès pour la première fois à notre histoire au-delà de 6 Ma. Après avoir reconnu le grade Homo puis le grade australopithèque, il apparaît maintenant que Toumaï appartient à un nouveau grade évolutif marqué, entre autres, par un complexe C/P3 perdant sa fonction aiguisoir. Ce grade aurait pu précéder ou bien être associé à l'acquisition d'une bipédie primitive (Orrorin tugenensis).
Dans l'état actuel des connaissances, et alors même que le genre Orrorin vient d'être considéré comme un synonyme junior de Ardipithecus[17], il est bien difficile de préciser les contours de la diversité taxonomique de ce grade évolutif ancien en l'absence de nouveaux documents paléontologiques.
Remerciements
Nous remercions les autorités tchadiennes (ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, université de N'Djaména, Cnar) et les autorités françaises (ministère français de l'Éducation nationale (faculté des sciences, université de Poitiers), ministère de la Recherche (CNRS), ministère des Affaires étrangères (Direction de la coopération scientifique, universitaire et de recherche, Paris et SCAC N'Djaména), la Région Poitou-Charentes, le département de la Vienne, ainsi que l'armée française (MAM et Epervier) pour son support logistique. Notre gratitude va au RHOI (co-PI's F.C. Howell and T.D. White), programme scientifique financé par la NSF. Nos remerciements vont également aux différents musées : National Museum of Kenya (Nairobi), National Museum of Ethiopia (Addis Ababa), Peabody Museum at Harvard University (Cambridge, MA), University of California (Berkeley, CA), Institute of Human Origins (Tempe, AZ), qui nous ont donné accès à leurs collections. Les auteurs remercient particulièrement le scanner IRM Poitou-Charentes, le scanner industriel de l'EMPA à Dübendorf (Suisse), le Multimedia Laboratorium (Department of Computer Science), université de Zurich–Irchel, et le European Synchrotron Radiation Facility (Beamlines ID 17 & ID 19) de Grenoble. Merci également à tous les collègues et amis qui nous ont soutenus, aidés et conseillés au cours de ces recherches. Nous remercions particulièrement tous les autres membres de la MPFT qui ont participé aux missions de terrain, ainsi que l'ensemble des techniciens et administratifs du laboratoire UMR 6046 de l'université de Poitiers.
ArambourgC.CoppensY.Découverte d'un australopithécien nouveau dans les gisements de l'Omo (Éthiopie)64196858–59BoisserieJ.-R.2002université de Poitiers440 p.BroomR.Pleistocene anthropoid apes of South Africa1421938377–379BrunetM.WhiteT.D.Deux nouvelles espèces de Suini (Mammalia, Suidae) du continent africain (Éthiopie ; Tchad)332200151–57BrunetM.The first australopithecine 2500 kilometres west of the Rift Valley (Chad)3781995273–275BrunetM.Australopithecus bahrelghazali, une nouvelle espèce d'Hominidé ancien de la région de Koro Toro (Tchad)3221996907–913BrunetM.BeauvilainA.GeraadsD.GuyF.KasserM.MackayeH.T.MaclatchyL.M.MouchelinG.SudreJ.VignaudP.Chad: discovery of a mammal fauna in the Early Pliocene3261998153–158BrunetM.MPFTChad, discovery of a vertebrate fauna close to the Mio-Pliocene boundary2012000199–203BrunetM.BeauvilainA.GeraadsD.GuyF.KasserM.MackayeH.T.MaclatchyL.M.MouchelinG.SudreJ.VignaudP.Tchad : un nouveau site à Hominidés Pliocène3241997341–345BrunetM.A new hominid from the Upper Miocene of Chad, Central Africa4182002145–151BrunetM.Sahelanthropus or Sahelpithecus? Reply to Wolpoff et al4192002582CoppensY.1983Jacob/FayardParisDartR.Australopithecus africanus, the man-ape of South Africa1151925195–199DuringerP.BrunetM.CambefortY.LikiusA.MackayeH.T.SchusterM.VignaudP.First discovery of fossil dung beetle broods balls and nests in the Chadian Pliocene Australopithecine levels332000277–284GhienneJ.-M.SchusterM.BernardA.DuringerP.BrunetM.The Holocene giant Lake Chad revealed by digital elevation models87200181–85Haile-SelassieY.Late Miocene hominids from the Middle Awash, Ethiopia4122001178–181Y. Haile-Selassie, A Late Miocene hominid from the Middle Awash, Ethiopia, relationship with contemporary hominoid taxa, Paleoanthropology Society, Annual Meeting, Tempe Arizona, 2003, abstractJohansonD.C.WhiteT.D.CoppensY.A new species of the genus Australopithecus (Primate: Hominidae) from the Pliocene of Eastern Africa2819781–14KortlandtA.1972Stichting voor PsychobiologieAmsterdamKumarS.HedgesB.A molecular time scale for vertebrate evolution3921998917–920LeakeyL.S.B.A new fossil skull from Olduvai1841959491–493LeakeyM.G.FeibelC.S.McDougallI.WalkerA.C.New four-million-year-old hominid species from Kanapoi and Allia Bay, Kenya3761995565–571A. Likius, Les très grands ongulés mio-pliocènes du Tchad (Rhinocerotidae, Giraffidae et Camelidae) : systématique, implications paléobiogéographiques et paléoenvironnementales, thèse, université de Poitiers, 2002, 193 pMacDougallI.FeibelC.LeakeyM.G.HarrisJ.M.2003Columbia University PressNew York43–64H.T. Mackaye, Les Proboscidiens du Mio-Pliocène du Tchad : biodiversité, biochronologie, paléoécologie et paléobiogéographie, thèse, université de Poitiers, 2001, 214 pPilbeamD.HartwigW.2002Columbia University PressNew York303–310M. Schuster, Sédimentologie et paléoécologie des séries à vertébrés du paléolac Tchad depuis le Miocène supérieur, thèse, université Louis-Pasteur, Strasbourg, 2002, 152 pSchusterM.DuringerP.NelA.BrunetM.VignaudP.AndossaL.Découverte de termitières fossiles dans les sites à Australopithèques du Pliocène tchadien : description, identification et implications paléoécologiques331200015–20SenutB.First hominid from the Miocene (Lukeino Formation, Kenya)3322001137–144VignaudP.Geology and Palaeontology of the Upper Miocene Toros-Menalla hominid locality, Djurab Desert, Northern Chad4182002152–155WhiteT.D.SuwaG.AsfawB.Australopithecus ramidus, a new species of hominid from Aramis, Ethiopia3711994306–312
Localisation géographique des principaux sites africains à Hominidés anciens : 1, Taung ; 2, Kromdraai, Sterkfontein, Swartkrans ; 3, Makapansgat ; 4, Laetoli ; 5, Olduvai ; 6, Kanapoi ; Lothagam ; 7, Koobi Fora ; 8, Omo ; 9, Middle Awash (Aramis, western margin) ; 10, Hadar ; 11, Bahr el Ghazal (KT 12–13) ; 12. Toros-Menalla.
Fig. 1. Geographic location of the main African localities of early hominids: 1, Taung; 2, Kromdraai, Sterkfontein, Swartkrans; 3, Makapansgat; 4, Laetoli; 5, Olduvai; 6, Kanapoi, Lothagam; 7, Koobi Fora; 8, Omo; 9, Middle Awash (Aramis, Western margin); 10, Hadar; 11. Bahr el Ghazal (KT 12–13); 12, Toros-Menalla.
Sahelanthropus tchadensis Brunet et al, 2002 : crâne holotype (TM266-01-060-1) en vue facio-latérale.
Fig. 2. Sahelanthropus tchadensis Brunet et al, 2002: holotype cranium (TM266-01-060-1) in facio-lateral view.
Sahelanthropus tchadensis Brunet et al, 2002. (A) Hémi-mandibule droite paratype (TM266-02-154-1) : 1, vue occlusale ; 2, reconstruction 3D : coupe horizontale au niveau des racines. (B) Canine inférieure droite paratype (TM266-02-154-2) : vue linguo-distale.
Fig. 3. Sahelanthropus tchadensis Brunet et al, 2002. (A) Right lower jaw paratype (TM266-02-154-1): 1, occlusal view; 2, 3D reconstruction: root’s axial section. (B) Right lower canine paratype (TM266-02-154-2): linguo-distal view.
Sahelanthropus tchadensis Brunet et al, 2002 : relations de parenté.
Fig. 4. Sahelanthropus tchadensis Brunet et al, 2002: phylogenetic relationships.