L’utilisation de la technique de PCR en temps réel a été testée pour la première fois dans l’étude de l’ADN ancien (ADNa). Les conditions optimales d’amplification déterminées ont permis d’obtenir, en une seule PCR, un produit d’amplification en quantité suffisante pour être directement séquencé. Outre la vérification de l’authenticité de l’ADNa, nous avons comparé deux méthodes de traitement de l’os : le scalpel et l’éthanol. Les spécimens traités à l’éthanol présentaient un meilleur rendement en ADN. Pour la réalisation de ce travail, nous avons analysé la région HVSI de la
The properties of ancient DNA make difficult the retrieval of ancient DNA sequences. Many authors used double PCR and nested PCR to obtain a PCR product in sufficient quantity to be sequenced. However, recent study showed that multiple PCR induce artefacts in ancient DNA.
We exploited the advantage of the Real-Time PCR in order to amplify, in one round of PCR, ancient DNA that should be directly sequenced.
Five skeletons with a dislocation of hip were exhumed from the archaeological site of Notre-Dame-du-Bourg (Digne, France), dated from 3rd to 17th century. The femur was cleaned with two methods. In the first method, the bone outer surfaces were removed with sterile scalpel. In the second method, scalpel was substituted by 70% ethanol. 0.5 ml of bone powder were incubated in 4 ml of extraction buffer during 48 h with slow rotation. A phenol/dichloromethane extraction was performed on the supernatant, the water phase was purified and the potential DNA concentrated on the centricon.
The amplification of mitochondrial DNA control region (D-loop), hyper variable segment I (HVSI) was performed in the Taq Man ABI prism 7700 sequence detection system. The Taq Man allows carrying out a real time PCR. It detects PCR products as they accumulate using DNA binding dye: Sybr Green I dye. Irradiated with UV light, Sybr green provides fluorescence proportional to accumulated PCR product. The amplification plot is the plot of the fluorescence signal versus the cycle number.
Several amplification tests were carrying out. In each one, we successively modified one of the following parameters: volume of Taq polymerase, volume of DNA extract and number of cycle.
The optimal conditions were determined. The 25 μl PCR reaction mixture consisted of 12.5 μl of buffer (Sybr Green Master mix), 10.2 μl of water, 1 μl of forward amplification primer (300 nM), 1 μl of the reverse amplification primer (300 nM), 1 U of Taq Gold and 0.3 μl of template DNA. PCR was carried out for 45 cycles using the following conditions: denaturation at 95 °C for 10 min, 15s at 95 °C and annealing-extension step at 60 °C for 1 min.
Many arguments support authenticity of ancient DNA. First, we observed inverse correlation between amplicon length and amplification efficiency. Moreover, for the same specimen (522 for example), DNA extract obtained from ethanol (522 ethanol) and scalpel (522 scalpel) specimen exhibited the same sequence. Finally we signalled that none of mutation located in the specimen’s sequences has been observed in the manipulator’s sequence.
In order to compare ethanol and scalpel method, we analysed four parameters: the PCR amplification rate, the amplification plot, the density of DNA bound on an agarose gel and the DNA sequence. Those observations showed that the best DNA yield was obtained in specimens cleaned with 70% ethanol.
The five specimens’ sequences (153 pb of HVSI) were aligned with Anderson reference sequence. Specimens: 1460 and 542 had the same sequence, with remarkable mutation: 16192 T. The sequences of 534, 522, and 469 were different. These five individuals are females and have the same pathology. It could be interesting to sequence the totality of mitochondrial genome with the aim of finding the specimen’s haplogroup and to propose or not a maternal relationship between 1460 and 542.
Grâce à l’invention de techniques de biologie moléculaire telles que la PCR (pour
Dans cet article, nous décrivons l’utilisation, pour la première fois, de la technique de PCR en temps réel
Les spécimens étudiés ont été exhumés du site archéologique de Notre-Dame-du-Bourg à Digne-les bains (745 km au sud-est de Paris)
Pour la préparation des échantillons osseux, deux méthodes ont été utilisées : la méthode publiée par Béraud-Colomb et al.
Après la préparation des spécimens suivant ces deux méthodes, le même protocole d’extraction et de purification à été suivi pour l’ensemble des échantillons. La réduction de l’os en poudre se fait au moyen d’une lame de scie neuve. 0.5 ml de poudre d’os est ajouté à 4 ml d’un tampon dont la composition est décrite par Béraud-Colomb
Toutes ces manipulations ont été réalisées dans des locaux dénommés « salle blanche », situés dans un bâtiment isolé de tout laboratoire de biologie moléculaire. À l’intérieur de ces locaux, une pièce isolée des autres pièces par un système de sas (sas d’entrée des produits livrés, sas de sortie des aliquotes à tester et à utiliser) contient toutes les solutions utilisées pour l’extraction. Ces solutions sont testées en PCR avant d’être aliquotées. Les pipettes et autres petits matériels sont dédiés à cette pièce. Nous utilisons blouses, charlottes, gants et masques stériles jetables. La paillasse est totalement nettoyée avant le traitement de chaque spécimen.
L’amplification du fragment HVSI de la 16034 sens : 5 ́GGGAAGCAGATTTGGGTACC 3 ́- 16093 sens : 5 ́TTCGTATTACTGCCAGCC 3 ́- 16170 sens : 5 ́AATCCACATCAAACCCCCT3 ́- 16223 anti-sens : 5 ́GGGTTGATTGCTGTACTTGC 3 ́- 16340 anti-sens : 5 ́TGTGCTATGTACGGTAAATGGCT 3 ́- 16427 anti-sens : 5 ́GGGATATTGATTTCACGGAGG 3 ́.
Les amplifications ont été effectuées sur le Taq Man ABI Prism 7700 Sequence Detection System (fournisseur : Applied Biosystems). Le Taq Man permet de réaliser une PCR quantitative en temps réel. Outre les composants habituels d’une PCR traditionnelle, le mélange contient un fluochrome : le Sybr Green. Le Sybr Green est une molécule fluorescente qui s’intercale dans l’ADN. Excitée par les rayons laser, le Sybr Green dégage une fluorescence proportionnelle à la quantité des produits de PCR formés. La fluorescence détectée par l’ordinateur du Taq Man est représentée sous forme de courbe exprimant ΔRN : fluorescence normalisée en fonction du nombre de cycles. Le maximum de fluorescence correspond à la phase d’élongation. Ces courbes nous permettent de suivre en direct le déroulement de la PCR.
De nombreux essais ont été réalisés dans le but d’optimiser les conditions d’amplification. Dans chacun de ces essais, nous avons modifié successivement un des paramètres suivants : le volume de l’extrait d’ADN puis la quantité de Taq polymérase et en fin le nombre de cycles (
Dans ce travail, nous n’avons pas utilisé la technique du clonage recommandée par certains auteurs pour mieux identifier les erreurs de la Taq polymérase
Les différents essais d’amplification ont concerné les neuf échantillons suivants : 522, 534, 469, 1460 scalpel et éthanol, ainsi que l’échantillon 542 éthanol. Le tube 542 scalpel a était endommagé au cours d’une centrifugation.
Pour suivre l’effet de chaque modification sur le déroulement de la PCR, nous avons analysé les résultats visualisés sur les courbes d’amplification (ΔRN en fonction du nombre de cycles) et les bandes d’ADN visualisées sur gel d’agarose.
Au cours de la première PCR, les conditions standards appliquées (
Cinq échantillons (scalpel : 522, 534 et éthanol : 469, 534, 542) sur huit testés (522 éthanol n’a pas été testé à nouveau ; il s’est déjà amplifié lors de l’essai 2) ont donné une amplification positive à la suite de l’addition d’une unité supplémentaire de la Taq polymérase (voir
Le passage de 40 à 45 cycles (quatrième essai) a permis l’amplification de tous les échantillons testés, sauf du 1460 éthanol.
Les conditions optimales d’amplification ont été obtenues, pour une PCR avec Sybr Green et pour un volume réactionnel de 25 μl, avec 12,5 μl du tampon : Sybr Green Master Mix (Applied Biosystems), 14,8 μl d’eau, 1 μl de
Nous avons réussi à amplifier, pour les cinq spécimens étudiés, les fragments d’ADNa dont la taille est comprise entre 130 et 189 pb. En revanche, seuls deux spécimens ont été amplifiés pour le fragment d’ADN de 257 pb (
Les séquences (153 pb) des cinq individus ont été alignées entre elles et avec la séquence de référence Anderson
Aucune des mutations repérées sur les séquences des échantillons étudiés n’a été trouvée dans la séquence du manipulateur.
Outre les précautions prises lors des manipulations (utilisation d’un matériel stérile, séparation des postes pré et post PCR, présence des témoins négatifs à toutes les étapes des manipulations), nous avons vérifié l’authenticité de l’ADNa, afin de valider les résultats obtenus et d’éliminer toute hypothèse en faveur d’une contamination exogène.
Premièrement, nous avons remarqué que le nombre de PCR réussies est inversement proportionnel à la taille du fragment d’ADN à amplifier. En effet, les pourcentages de PCR positives étaient respectivement de 99 %, 66 %, 55 % et 22 % pour des fragments d’ADN de 130,170,189 pb. Il s’agit d’une caractéristique de l’ADN ancien.
Ensuite, l’analyse bioinformatique des séquences d’ADN des différents échantillons a montré que ces séquences correspondaient bien à de l’ADN mitochondrial humain. L’hypothèse d’une contamination avec l’ADN actuel a été éliminée grâce aux observations suivantes : d’une part, l’alignement des séquences des différents individus avec la séquence de référence Anderson a permis de repérer des mutations qui ne figuraient pas sur la séquence du manipulateur ; d’autre part, trois individus parmi les cinq étudiés présentaient des séquences différentes les unes des autres ; enfin et surtout, les séquences issues d’un même individu mais provenant d’extractions indépendantes, effectuées selon des méthodes différentes, présentaient les mêmes haplotypes.
Afin de comparer le rendement des spécimens traités à l’éthanol et de ceux traités au scalpel, nous avons analysé les quatre paramètres suivants : la fréquence des amplifications, les courbes d’amplification, l’intensité des bandes d’ADN sur gel et les séquences.
Nous avons constaté que les spécimens traités à l’éthanol s’amplifiaient mieux que ceux traités au scalpel. Trois hypothèses peuvent expliquer ce résultat : Les spécimens éthanol contiendraient davantage d’ADN. Contrairement au traitement de l’os au scalpel, le nettoyage à l’éthanol évite la perte de matériel osseux compact. Nos résultats seraient en accord avec des publications précédentes Les spécimens éthanol contiendraient moins d’inhibiteurs de la réaction de PCR. Les inhibiteurs seraient plus concentrés à l’intérieur de l’os. Ceci reste à démontrer. La bonne amplification des spécimens éthanol serait due à une contamination. Cependant, nous avons observé la même séquence entre les échantillons éthanol et scalpel issus d’un même individu.
Au cours de ce travail, nous avons abordé une thématique novatrice, qui est l’application de la technique de la PCR en temps réel à l’étude de l’ADNa. Cette technique nous a permis de suivre le déroulement de la PCR, de mieux orienter les modifications de paramètres d’amplification, dans le but d’éviter les PCR successives et d’obtenir, après une seule PCR, un produit d’amplification en quantité suffisante pour être séquencé directement.
Les individus traités dans cet article sont de sexe féminin et ils étaient les seuls, parmi les 800 squelettes étudiés de la nécropole, à présenter une luxation congénitale de hanche. Il serait intéressant de séquencer la totalité du génome mitochondrial de ces individus afin de déterminer leurs haplogroupes et, peut-être, de proposer un lien de parenté maternel entre 1460 et 542, qui présentaient la même séquence sur 153 pb. Les individus 469, 534 et 522 présentaient des séquences différentes, ce qui exclut tout lien de parenté selon la lignée maternelle.
La détermination du protocole d’extraction de meilleur rendement et la mise au point des conditions optimales d’amplification sur le Taq Man devraient être très déterminantes pour aborder de nouvelles études ayant pour support l’ADN ancien.
Courbe d’amplification correspondant à l’essai n° 3 du Tableau 2. La lecture des courbes se fait de bas en haut (de 1 à 8).
(1) 1460 éthanol : ΔRN = 0
(2) 469 scalpel, (3) 1460 scalpel, 1,5 < ΔRN < 2
(4) 534 scalpel, (5) 534 éthanol, (6) 542 éthanol, (7) 469 éthanol, (8) 522 scalpel, 3 < ΔRN < 4
Fig. 1. Amplification curve of assay No. 3 in Table 2. Read curves from bottom to top (from 1 to 8).
Spécimens étudiés.
Specimens studied.
Différents essais d’amplification.
Amplification assay.
Résultats des amplifications.
Amplification results.
Alignement des séquences.
Sequence alignement.