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Mystacodon selenensis, the earliest known toothed mysticete (Cetacea, Mammalia) from the late Eocene of Peru: anatomy, phylogeny, and feeding adaptations

Christian de MUIZON, Giovanni BIANUCCI, Manuel MARTÍNEZ-CÁCERES & Olivier LAMBERT

en Geodiversitas 41 (11) - Pages 401-499

Publié le 30 mai 2019

Mystacodon selenensis, Le plus ancien mysticète à dents connu (Cetacea, Mammalia) de l'Éocène supérieur du Pérou : anatomie, phylogénie et adaptations alimentaires

Mystacodon selenensis Lambert, Martínez-Cáceres, Bianucci, Di Celma, Salas-Gismondi, Steurbaut, Urbina & Muizon, 2017 est un mysticète à dents qui constitue le plus ancien représentant du sous-ordre dans l’état actuel des connaissances. L’holotype est un squelette relativement complet provenant de l’Éocène supérieur (Priabonien inférieur) du Membre Yumaque de la Formation Paracas, de la côte sud du Pérou. La description détaillée de ce spécimen est présentée dans ce travail et révèle de nombreuses similitudes avec les basilosauridés contemporains, incluant la rétention d’un coxal initialement articulé au membre postérieur non préservé. Toutefois, plusieurs caractères de M. selenensis rattachent ce taxon aux mysticètes, tels que le vaste palais avec un rostre aplati dorsoventralement, l’extension postérieure du palais en une plaque infraorbitaire du maxillaire, le raccourcissement de la partie prémaxillaire du rostre, le processus zygomatique du squamosal, étroitement apposé au processus postorbitaire du frontal, et la tête humérale, orientée plus proximalement que postérieurement. Une analyse de parcimonie place Mystacodon à la base des mysticètes, sans lien phylogénétique étroit avec Llanocetus le deuxième plus ancien mysticète connu (c. 34.2 Ma). La formule dentaire de M. selenensis est celle des basilosauridés (I 3/3, C 1/1, P 4/4, M 2/3). Les dents antérieures (incisives et canine) sont relativement plus petites que celles des basilosauridés, tandis que les dents jugales sont très proches en longueur relative ; ces dernières sont, en revanche, nettement plus grandes que celles de tous les autres mysticètes à dents (à l’exception de Coronodon). Les dents jugales, relativement grandes, de Mystacodon suggèrent une stratégie d’alimentation de type prédateur, probablement aidée par des capacités de succion comme le laisse supposer la grande taille du palais. Les dents antérieures de l’holotype présentent des facettes d’usure apicales subhorizontales et les dents jugales des surfaces d’usure modérément inclinées qui diffèrent des facettes d’attrition subverticales des basilosauridés. Ce modèle suggère une abrasion efficace des dents résultant de l’absorption d’une nourriture abrasive, ou/et de l’ingestion de sédiment lors de la capture des proies, ce qui impliquerait une alimentation, au moins en partie, sur le fond. Sur le membre antérieur, la taille et l’orientation de l’acromion, la grande longueur de la crête deltopectorale, le caractère massif de l’olécrâne de l’ulna, et le fort processus radial antérieur indiquent de puissants mouvements de l’épaule, qui suggèrent un usage actif du membre antérieur lors de la recherche de nourriture sur les fonds marins. La robustesse des doigts ainsi que la pachyostéosclérose et la dilatation distale des côtes semblent corroborer ce scénario. Mystacodon représente le premier pas dans l’histoire évolutive de l’adaptation alimentaire des premiers mysticètes ; ces derniers ont vraisemblablement expérimenté tout un ensemble de stratégies alimentaires et étaient probablement très éclectiques dans le choix et la capture de leurs proies, avant que ne se généralise, au sein du sous-ordre, une alimentation hyperspécialisée par filtration.


Mots-clés :

Cetacea, mysticète à dents, Éocène supérieur, Pérou, phylogénie, anatomie, morphologie fonctionnelle, stratégies alimentaires

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