Accueil

Mayulestes ferox, a borhyaenoid (Metatheria, Mammalia) from the early Palaeocene of Bolivia. Phylogenetic and paleobiologic implications

Christian de MUIZON

en Geodiversitas 20 (1) - Pages 19-142

Publié le 06 avril 1998

Mayulestes ferox, un Borhyaenoidea (Metatheria, Mammalia) du Paléocène inférieur de Bolivie. Implications phylogénétiques et paléobiologiques

Mayulestes ferox est un marsupial Borhyaenoidea du Paléocène inférieur de Tiupampa (Bolivie). L'holotype et unique spécimen connu est un squelette partiel comprenant le crâne complet, la mandibule incomplète et la plupart des os des membres, lesquels sont décrits et discutés ci-dessous. Mayulestes ferox est un représentant de la famille des Mayulestidae, un taxon qui inclut également l'espèce Allqokirus australis, provenant de la même localité et du même âge, mais connue uniquement par quelques molaires isolées. Mayulestes et Allqokirus sont les deux plus anciens Borhyaenoidea connus. Mayulestes diffère d'Allqokirus par la morphologie et la proportion de ses molaires. Un caractère important des molaires des deux genres est la réduction de l'entoconide qui est considérée ici comme une synapomorphie des Mayulestidae. Mayulestes possède la formule dentaire plésiomorphe pour les marsupiaux (I5/i4 ; C/c ; P3/p3 ; M4/m4) et la morphologie de ses molaires est proche du patron plésiomorphe des dents jugales de marsupiaux. Mayulestes ferox ne présente pas de processus tympanique de l'alisphénoïde, une structure dont la présence est généralement considérée comme une synapomorphie de marsupiaux. Des comparaisons avec les autres taxons de borhyaenoïdes indiquent que l'absence de processus tympanique de l'alisphénoïde est en fait une plésiomorphie pour la superfamille, et il est émis l'hypothèse que ce caractère est apparu plusieurs fois au cours de l'évolution des marsupiaux. Le squamosal de Mayulestes présente un processus médial bien développé. Dans la région auditive, entre le foramen ovale et la cavité glénoïde du squamosal, on observe une cavité peu profonde (le toit du sinus alisphénoïde), creusée dans le processus médial du squamosal antérieurement, dans le périotique postérieurement et dans l'alisphénoïde entre les deux. La participation du squamosal à la constitution du toit du sinus alisphénoïde est considérée ici comme la principale synapomorphie des borhyaenoïdes. Les autres synapomorphies de la superfamille sont la perte du canal prootique, la réduction et la perte du processus antérolatéral du maxillaire et la perte probable des os épipubiens. Le squelette post-crânien de Mayulestes est connu par une vingtaine de vertèbres partielles ou complètes, quelques côtes, et par la plupart des principaux os des membres. Une comparaison avec les didelphidés actuels, Pucadelphys, les autres borhyaenoïdes et plusieurs mammifères arboricoles (ou supposés arboricoles) tels que les sciuridés, les tupaidés, les procyonidés, certains multituberculés, morganucodontes, triconodontes et Henkelotherium révèle que beaucoup de caractères du squelette post-crânien de Mayulestes (queue probablement préhensile ; angle postéro-dorsal de la scapula étiré postéro-dorsalement ; acromion projeté antérieurement et distalement ; tubercules de l'humérus relativement bas ; forme circulaire de la tête de l'humérus ; grande taille de la crête épiconylienne et projection disto-médiale de l'épicondyle ; profonde fosse des fléchisseurs sur la face médiale de l'olécrâne de l'ulna ; morphologie du McV ; grande mobilité de la hanche attestée par la faible profondeur de l'acétabulum et le développement des trochanters fémoraux ; forme sigmoïde du tibia et morphologie de son articulation distale ; forme et orientation de la facette ectale du calcanéum ; grande taille du processus péronéen et tuber calcanei comprimé transversalement) indiquent un mode de vie arboricole. Plusieurs autres caractères (taille de l'épine neurale et des apophyse transverses des vertèbres lombaires ; morphologie des zygapophyses des dernières vertèbres dorsales et des lombaires ; olécrâne de l'ulna, long et recourbé antérieurement ; éversion de l'aile de lilium ; profondeur relative de la trochlée fémorale ; épiphyse distale du tibia aplatie antéro-postérieurement et grande longueur du tuber calcanei) indiquent que Mayulestes était un animal relativement agile, capable d'adopter une démarche rapide et de faire des bonds. Mayulestes est interprété comme un prédateur partiellement arboricole capable de bonds et de course rapide mais de courte durée. Mayulestes était certainement assez agile et a pu avoir une niche écologique voisine de celle des martres et des belettes actuelles. Plusieurs caractères arboricoles de Mayulestes sont aussi présents chez Pucadelphys, un marsupial didelphidé provenant du même gisement. En conséquence, cette forme est également interprétée comme étant partiellement arboricole, bien qu'à un degré moins poussé que chez Mayulestes. Le fait que les deux squelettes les plus anciens de marsupiaux américains possèdent des caractères liés à l'arboricolie renforce l'hypothèse selon laquelle ce mode de vie est probablement une symplésiomorphie chez les marsupiaux.


Mots-clés :

Marsupialia, Borhyaenoidea, Paléocène, Bolivie, phylogénie, anatomie fonctionnelle

Télécharger l'article complet au format PDF Commander une version imprimée